Bon, allez, le débat ne passionne pas les foules, alors levons le voile.
C'est quoi finalement une propriété pour laquelle le principe de récurrence est applicable sans restriction ? C'est quoi une propriété "pas floue", "objective", "précise" ? Pourquoi certaines propriétés posent un problème de limites et d'autres pas ?
"numérique" ? c'est encore vague... à quelles opérations on a droit, etc etc
Dans la Grèce antique, ça portait un nom : un prédicat, la logique moderne lui a substitué la notion d'ensemble. Une propriété, c'est un ensemble.
Avoir ou pas la propriété revient à appartenir ou pas à l'ensemble associé.
Pour les entiers, une propriété c'est donc juste une partie de [latex]\mathbb{N}[/latex], autrement dit, on identifie [latex]P(n)[/latex] avec [latex]n\in P[/latex].
Ainsi, les nombres premiers forment une partie de [latex]\mathbb{N}[/latex], "être premier" est une propriété, en revanche les tailles humaines qu'on peut qualifier de "très grandes" ne forment pas une partie de [latex]\mathbb{N}[/latex], car étant donné une taille on ne peut pas toujours dans l'absolu (à moins de mettre un seuil arbitraire) la classer dans les très grandes ou pas. On peut en juger pour 2m50 ou 1m10, mais pas pour 1m82 ou 1m92. Idem pour les plages, impossible de dire à partir de quand on devient (potentiellement) une plage.
On peut ensuite prouver que si une propriété [latex]P[/latex] est un ensemble alors le principe de récurrence s'y applique correctement :
En effet, supposons que :
1) [latex]0\in P[/latex]
2) [latex]\forall n\geq 0 : n\in P \rightarrow (n+1)\in P[/latex]
et prouvons que : [latex]\forall n\geq 0 : n\in P[/latex]
Par l'absurde, si [latex]\exists n\geq 0 : n\not\in P[/latex] alors soit [latex]E=\{m\in\mathbb{N} : m\not\in P\}[/latex], or par hypothèse [latex]E\neq \emptyset[/latex].
Comme toute partie de [latex]\mathbb{N}[/latex] admet une borne inférieure, soit [latex]n_0=\inf(E)[/latex], [latex]n_0\neq 0[/latex] car [latex]0\in P[/latex], donc [latex]n_0[/latex] a un prédecesseur dans [latex]\mathbb{N}[/latex] qu'on appelle habituellement [latex]n_0-1[/latex]. Mais [latex]n_0-1 \in P[/latex], et donc, d'après l'hypothèse 2, [latex]n_0\in P[/latex] : contradiction.
Cette démonstration n'est possible que si l'on peut former l'ensemble [latex]E[/latex].
Mais si une propriété est une partie de [latex]\mathbb{N}[/latex], il y a donc autant de propriétés distinctes que de partie de [latex]\mathbb{N}[/latex], soit [latex]2^{\aleph_0}[/latex]. Pour ceux qui en ont entendu parler, ceci est à la base du théorème de Gödel : il y a plus de propriétés possibles que de formules les exprimant...